Château

4, rue du Guernes

Plusieurs demeures précédèrent le domaine actuel : une forteresse féodale appartenant aux seigneurs de Mauvoisin, un castel assiégé, brûlé et rasé par les Anglais pendant la Guerre de 100 ans et qui, finalement, revint à la famille de Béthune en 1529. Cap sur l'histoire des plus illustres propriétaires de ce monument emblématique qui domina la vie locale.

1598-1718 : LE DUC DE SULLY

Maximilien de Béthune, né le 13 décembre 1559 au château féodal de Rosny, surintendant des finances d'Henri IV et grand maître de l'artillerie de France, était passionné de beaux édifices. En 1598, il entreprit de faire reconstruire le château grâce à 10 000 écus que lui avait donnés le roi, roi qui d'ailleurs vint visiter le domaine en 1603. Bâti en briques et en pierres avec un plan en U, la bâtisse comprenait un corps central avec sur les côtés deux ailes terminées par des pavillons, le tout recouvert de hautes toitures d'ardoises. Le portail d'entrée en arc de triomphe était orné de colonnes sculptées en formes de fûts de canons, grenades et casques en trophées. Sully fit notamment planter de jeunes ormes et une grande quantité de mûriers destiné à l'élevage des vers à soie. On dit que le duc laissa le château inachevé, témoignage de son chagrin à la mort du roi.

Gravure du château de Sully (1610)

1718-1817 : DES SENOZAN AUX TALLEYRAND-PERIGORD

La demeure a été vendue au comte François Olivier de Sénozan, issu d'une puissante famille de parlementaires. Il agrandit le domaine en achetant le prieuré de Saint-Wandrille et le chemin du Petit Rosny et le remania considérablement. Il fit redessiner les jardins à l'instar de ceux de Versailles, reconstitua la terrasse créée par Sully. Il entreprit aussi des travaux pour endiguer les inondations et amener l’eau dans le parc. Son fils fit construire un « pavillon des Bains ». Une grille monumentale en fer forgé fut placée à l'entrée du domaine.

Sa petite fille Madeleine-Sabine de Sénozan-Viriville, épousa le comte Joseph-Archambaud de Talleyrand-Périgord. Durant la révolution, il émigra tandis que sa femme, restée à Paris, fut guillotinée en 1794. Leurs biens mis sous séquestre furent restitués à leurs enfants en 1796.

1818-1830 : LA DUCHESSE DE BERRY

Vendu en 1817 à un négociant parisien, le domaine est racheté en 1818 par le duc de Berry, fils du comte d'Artois et époux de Marie-Caroline des Deux-Siciles. Deux ans plus tard, le prince est assassiné.

La duchesse de Berry très attachée à ce domaine, fit réaliser de grands travaux par Joseph-Antoine Froelicher, son architecte attitré, : restauration complète des façades, construction des ailes (à 4 niveaux) laissées inachevées par Sully, agrandissement de la demeure grâce à un grand avant-corps couvert d’une terrasse qui double le logis central dans toute sa longueur. Les intérieurs furent remis au goût du jour avec des meubles et des objets d'art exceptionnels sans être fastueux.

Très férue de botanique, elle porta une attention particulière au parc, totalement redessiné « à l'Anglaise ». D'importantes plantations furent réalisées : en 1820, pas moins de 3600 arbres ont été plantés et 4793 sujets issus des pépinières du château en 1826 ! Le vaste jardin potager et la serre chaude permettaient de faire pousser des légumes et des fruits dont 14000 pieds de fraises de 8 variétés différentes. Le parc fut peuplé de cerfs, de daims, de biches naines, de kangourous et d'un troupeau de moutons, chevaux corses et ânes. La «rivière anglaise» enjambée par deux ponts, avec cascade artificielle, fut le plus gros chantier.

La duchesse de Berry mena ici une vie plus libre qu'aux Tuileries et fit preuve d'une grande générosité envers les habitants. Chaque année à la Saint-Henri, elle organisait une fête champêtre à laquelle tout le bourg était invité. Ses divertissements favoris : le billard, la chasse au lapin assistée de son chien Foliche, les promenades en bateau sur la Seine à bord d'une goélette et d'un yacht à douze rameurs. Acculée par la Révolution de juillet 1830, elle quitta la France pour l'Autriche, elle vendit le domaine aux enchères.

1830-1869 : LE COMTE DE MAROIS

Le château et le domaine furent vendus à un banquier anglais, lequel le céda à son tour à une compagnie d'agents d'affaires appelée La Bande noire. Le domaine morcelé. c'est le comte Le Marois, acquéreur en 1840, qui sauva le bâtiment de la destruction. Il fit abattre en 1846 les ailes du bâtiment.

1869-1955 : LA FAMILLE LEBAUDY

En 1869, le château fut acquis par Gustave Lebaudy, député de Seine-et-Oise, issu d'une puissante dynastie de l'industrie sucrière. Il restaura intégralement la demeure et racheta le mobilier et les objets d'art ayant appartenu au duc de Sully et à la duchesse de Berry. Son fils Paul hérita de Rosny. Féru de chasse à courre, il aménagea les communs pour héberger ses écuries et sa meute de chiens. Vers la fin du XIXe siècle, il recréa des jardins à la française. Le château fut classé monument historique en 1941. En 1947, il accueillit, durant le Jamboree de la paix, la 11e conférence Mondiale du scoutisme. Après la mort de Mme Lebaudy en 1949, son fils Jean, né à Rosny, vendit le château en 1955 en y laissant l'ensemble des biens mobiliers.

DE NOS JOURS

Un médecin, propriétaire en 1955, aménagea un centre de rééducation (l'APARC dans les communs. Acquis en décembre 1984 par une société japonaise, il fut dépouillé de son mobilier, vendu aux enchères. Deux tapisseries de Bruxelles ont été préemptées en faveur de la commune grâce aux subventions du département des Yvelines et du Ministère de la culture. Laissé à l'abandon, il est ravagé par de multiples dégradations et par un incendie le 24 janvier 1997. Pour sauver ce monument classé, la Commission des monuments historiques mit en demeure le propriétaire d’exécuter des travaux. En vain. La Ministre de la culture et de la communication ordonna l'exécution du chantier et l'Etat fit exproprier le propriétaire. Depuis 1999, le château appartient à des propriétaires privés successifs, le dernier ayant entrepris de restaurer entièrement le domaine.